Dépendances

N° 32 La régulation du marché des produits psychostropes

Edito par Jean-Félix Savary

Le rapport entre l'Etat et les substances psychotropes a de tous temps été compliqué. Les dimensions fiscales, morales voir même politiques ont longtemps gouverné cette relation complexe, variable et polymorphe. Bien que celles-ci demeurent, on aurait tort de se le cacher, une nouvelle dimension gagne progressivement nos sociétés occidentales, celle de la santé publique. Cependant, en matière de régulation du marché, il est bien difficile de poser un débat scientifique et d'aller au-delà des préjugés. Si aux niveaux des traitements, de la prévention, puis, plus récemment, de la réduction des risques, les réflexions transversales entre substances progressent et se matérialisent sur le terrain par des pratiques intégrées, il en va habituellement tout autrement pour le contrôle du marché. Cependant, aujourd'hui, le terme de «régulation du marché» tend progressivement à s'imposer pour toutes les substances. L'adjonction par le rapport psychoactiv.ch de deux dimensions supplémentaires au modèle des «quatre piliers», devenu ainsi cubique, demandait cette adaptation langagière. Son avantage est double.

Premièrement, il nous fait sortir de la logique manichéenne contenue dans le terme répression utilisé pour les drogues illégales. Le vocable de régulation contient l'idée d'une pondération entre différents objectifs qui peuvent être contradictoires.La régulation ne prend pas en compte une seule variable, mais tente de concilier son action avec un ensemble de facteurs, contenus dans un environnement complexe et dynamique. La régulation s'adapte à la réalité, de manière pragmatiques, en considérant les faits. Ses réponses seront donc différentes selon les lieux, les publics visés et les produits.

Deuxièmement, comprise comme prévention structurelle, la régulation du marché permet également de rapprocher le contrôle de la prévention. L'action de l'Etat sur le marché d'une substance est ainsi directement liée à son incidence sur la santé publique. L'utilisation du concept de «régulation du marché» pour l'ensemble des produits psychotropes semble donc une bonne chose. Au-delà des comparaisons qu'elle permet, elle soustend une réflexion plus pragmatique sur le contrôle des produits. Certes, les débats récents sur l'imposition de la bière, voire sur la LStup, nous montrent que le chemin à parcourir est encore long avant que cette logique ne s'impose finalement au plan politique, mais la direction est donnée et il nous incombe d'y oeuvrer dans ce sens. C'est ce que fait ce numéro, qui tente de donner quelques points d'appuis sur cette question, en adoptant une perspective résolument transversale, des médicaments à l'héroïne, en passant par l'alcool et le tabac.

1. Prévention structurelle en matière d'alcool: utilité et perspectives

Lucien Erard, directeur de la Régie fédérale des alcools, Berne

01.09.2007

2. La politique tabac en France: changer la norme sociale au nom de la santé publique

Bertrand Dautzenberg, pneumologue, Groupe hospitalier Pitié Salpêtrière et président de l'Office français de Prévention du Tabagisme, Paris

01.09.2007

4. Les variables du marché des stupéfiants: l'exemple de l'héroïne

Olivier Guéniat, chef de la police judiciaire du canton de Neuchâtel

Pierre Esseiva, professeur à l'Ecole des sciences criminelles, Institut de Police Scientifique, Université de Lausanne

01.09.2007

5. La régulation du marché des médicaments

Interview de Monique Helfer, responsable de communication chez Swissmedic, Berne

01.09.2007

6. PS: Thérapies résidentielles des addictions en Suisse: des indicateurs dans le rouge

Nicolas Dietrich, Franziska Eckmann et Ueli Simmel, Infodrog, Berne

01.09.2007