Stratégie Addictions

Introduction

La politique des addictions est un secteur transversal, riche et complexe qui place l'être humain et la société face à de nouveaux défis. Pour donner un cadre à ce domaine en mouvement constant, le Conseil fédéral a adopté la Stratégie nationale Addictions en 2016.

Définition

La Stratégie nationale Addictions (ou stratégie addictions), comme son nom l'indique, offre un cadre global stratégique qui doit permettre d’augmenter l’efficience des activités pour toutes les addictions tant sur le plan des substances que sur celui des comportements.

La multiplicité des acteurs concernés et la diversité des thèmes obligent, en effet, à disposer d’un référentiel commun. D’une part, les trois niveaux du fédéralisme se partagent les compétences sur le plan sanitaire et sur le plan social. D’autre part, en raison de sa transversalité, le domaine des addictions touche à des secteurs d’activité qui sont amenés à travailler ensemble, comme ceux de la sécurité, de la police du commerce, de l'économie, de l'éducation ou de la migration. Enfin, les addictions concernent plusieurs marchés, certains légaux comme le tabac et l’alcool ou encore les médicaments, d’autres illégaux comme les drogues interdites. Une stratégie nationale en la matière se révèle par conséquent être un instrument absolument essentiel pour qui se préoccupe de la bonne gestion publique. La Stratégie Addictions peut être associée à deux autres stratégie et plan, maladies non transmissibles et santé psychique.

Contexte

La Stratégie Addictions est un cadre de référence de 88 pages entré en vigueur en 2017. Flanquée de son plan de mesures, elle dépeint une vision plus horizontale des problèmes d'addiction. Les substances ne sont plus cloisonnées entre elles, les comportements font leur entrée dans les addictions possibles et surtout, cette stratégie réserve une grande place à la réduction des risques et à la responsabilité individuelle.

La politique des addictions est un secteur en constante évolution, sans cesse confronté à de nouveaux défis comme le changement des schémas comportementaux et des tendances de consommation.

Stratégie Addictions

La Stratégie nationale Addictions forme avec la Stratégie nationale Prévention des maladies non transmissibles (MNT) le socle de la promotion de la santé et de la prévention des maladies en Suisse. C'est l'objectif 1.3 (page 7) du programme Santé2020 adopté en 2013 par le Conseil fédéral, dont les 36 mesures visent à assurer la qualité de vie, à renforcer l'égalité des chances, à améliorer la qualité des soins et à optimiser la transparence.

Avant la Stratégie nationale Addictions, les programmes de référence étaient développés par substance. Ainsi, nous trouvions un Programme national alcool (PNA), un Programme national tabac (PNT) et le Programme drogues (ProMeDro). La refonte des programmes en 2016 a eu comme conséquence que les programmes spécifiques disparaissent au bénéfice d'un programme global et transversal.

Lien sur la page de la Stratégie nationale Addictions 2017-2024 sur le site de l'OFSP

Stratégie des maladies non transmissibles

Les maladies non transmissibles sont aujourd’hui la première cause de mortalité dans le monde (environ 75% de décès en Suisse, selon le site de l'OFSP qui s'appuie sur l'Enquête suisse sur la santé). La Stratégie nationale Prévention des maladies non transmissibles (MNT) vise à renforcer les compétences de la population en matière de santé et de créer les conditions qui facilitent un comportement plus sain. La finalité consiste à réduire les risques de développer les maladies qui causent le plus de décès en Suisse : maladies cardio-vasculaires, cancers, maladies des voies respiratoires et le diabète.

Avec la Stratégie Addictions, elle inclut la prise en charge médicale, la réduction des dommages, le conseil et la thérapie et favorisera la réintégration sociale et la réadaptation des personnes dépendantes. 

Lien sur la Stratégie des maladies non transmissibles sur la page de l'OFSP

Rapport sur la santé psychique

Dans l'objectif 1.3 de Santé2020 visant la qualité de vie, la santé mentale occupe une place importante au même tire que les maladies non transmissibles et les addictions. Sur ce dossier, le Dialogue Politique nationale de la santé (PNS), plateforme permanente de la Confédération et des cantons, a mis sur pied un groupe de projets qui comprend des représentants de l'OFSP, de la Conférence suisse des directrices et directeurs cantonaux de la santé (CDS) et de la fondation Promotion Santé Suisse. Ce rapport veut promouvoir la santé psychique et améliorer la prévention ainsi que la détection précoce des maladies correspondantes afin d’en réduire l’incidence et, en particulier, éviter l’exclusion du monde du travail des personnes atteintes. Le rapport présente la situation nationale, régionale et cantonale. Il indique aussi les besoins futurs concernant la coordination et les adaptations. 

Lien sur la Promotion de la santé psychique (et tous les rapports) le site de l'OFSP

Enjeux

Les enjeux liés à la nouvelle stratégie sont nombreux : l'approche n'est plus cloisonnée aux seuls produits mais intègre les comportements (jeux, écrans, achats compulsifs, etc.). La posture envers les consommateurs change également et devient plus horizontale, en considérant les usagers comme des partenaires, au même niveau que les professionnels. La prise en charge cède progressivement du terrain à l’accompagnement, et il est demandé à la personne d’assumer davantage de responsabilités. 

La Stratégie Addictions « part du principe que l’individu est responsable de ses choix de vie et de son comportement individuel, y compris en matière de santé. Son but est d’encourager la prise de responsabilité́ en renforçant les compétences en matière de santé. Cela permet à l’individu de faire ses choix en connaissance de cause des risques et des conséquences possibles ».

Les enjeux de la Stratégies Addictions sont les suivants:

  • Si l'approche centrée sur l'individu comporte de réelles opportunités en matière de droits humains, elle ne doit surtout pas servir de prétexte à une diminution de la solidarité. La responsabilité individuelle n'est pas un argument pour faire supporter les conséquences du comportement addictif aux personnes touchées. Un juste équilibre doit être trouvé entre responsabilité individuelle et responsabilité de la société.
  • Il convient également de prendre en compte les situations très différentes que vivent les personnes, notamment au niveau des inégalités de santé. Selon la situation en matière de santé mentale, de handicap, d’insertion sociale ou de ressources financières, le concept de responsabilité prend un sens forcément très différent.
  • L'accompagnement de la personne, sur lequel la stratégie insiste, ne doit pas se faire au détriment de la prise en charge justifiée par des considérations économiques. Au centre de l'addiction il y a un être humain et ce dernier doit pouvoir bénéficier de toutes les solutions d'aide envisagées et envisageables.
  • La responsabilité individuelle ne doit pas être une porte ouverte au libéralisme à tout crin. Les autorités doivent continuer à règlementer les secteurs de l'industrie des addictions, comme celui de l'alcool, du tabac ou des jeux, qui ont aussi une part de responsabilité dans l'émergence d'une addiction.
  • La protection de la jeunesse mérite aussi d'être continuellement soutenue, là encore, dans un juste équilibre avec les enjeux économiques.
  • Bien qu'elle se rapproche par certains aspects de la Stratégie MNT (qui, elle, considère certaines substances à travers la lorgnette médicale), la Stratégie Addictions reste une préoccupation à part entière pour nourrir le débat sous l'angle social.
Repères historiques

L'époque du tout répressif qui prévalait en Suisse dans les années 70, puis au plus fort des années sombres des zones ouvertes de la drogue, semble révolu. L'approche de la Stratégie Addictions est plus tolérante et centrée sur la santé et les droits humains. Elle reste fidèle toutefois à la politique des 4 piliers du début des années 90 qui repose sur:

  1. la prévention : contribue à réduire la consommation des substances ou à éviter que des personnes ne commencent à consommer. La promotion de la santé et l'intervention précoce font par exemple partie de ce pilier.
  2. la thérapie : vise à soigner tout en abordant la possibilité de sortir de la dépendance. Les traitements de substitution ou la consommation contrôlée font partie du traitement.
  3. la réduction des risques : réduit les dommages associés (maladies infectieuses par exemple) pour des personnes qui sont dans l'incapacité ou qui n'ont pas la volonté de cesser de consommer. La distribution de seringues propres ou le drug checking sont des outils de réduction des risques.
  4. la répression (devient régulation dans la stratégie) : vise à appliquer les règlementations et à contrôler les marchés

 

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Le cube de la stratégie est emprunté au cube de la CFLD (Commission fédérale pour les questions liées aux drogues, 2005 - devenue en 2020 la Commission fédérale pour les questions liées aux addictions, CFANT). Il jette les premières bases d'une politique intégrée qui favorise l'interdisciplinarité et veut construire une réflexion dialectique plutôt qu'un débat polarisé entre ce qui est bien ou mal. Ce cube est encore complété des axes coordination, sensibilisation, connaissances et politique internationale.

La Stratégie nationale Addictions est le fruit de ce processus. Elle marque une rupture entre la vision paternaliste des années 70 et s'engage sur une voie plus libérale, plus humaniste et intégrative des politiques drogues.